L’Union Européenne (UE) élabore sa stratégie de mise en œuvre de la convention de Minamata, une réglementation internationale sur le mercure en attente de ratification. L’« utilisation d’amalgames dentaires » fait partie des « six domaines dans lesquels la législation européenne ne rejoint pas encore la convention de Minamata ». Mais les principes qui guident ici la Commission européenne bafouent les règles élémentaires de la démocratie et de la prévention.
Premier principe : ratifier au plus vite et à moindre frais.
La Commission considère que l’UE a déjà fait suffisamment en matière d’environnement et de santé. Du coup, elle vise en « p
riorité » une «
ratification rapide » ; en effet, «
l'application de la convention par les pays tiers » devrait permettre « une réduction des émissions mondiales de mercure et [...] de la contamination de la chaîne alimentaire aussi bien à l'échelle mondiale qu'à celle de l'Union. » La Commission s’exonère ainsi de toute démarche ambitieuse pour son propre compte : les mesures qu’elle envisage «
correspondent pour l'essentiel aux changements minimums à apporter pour permettre la ratification ».
Deuxième principe : les considérations économiques l’emportent sur la transparence et la démocratie.
«
En ce qui concerne les amalgames dentaires, une très grande majorité de particuliers et d'ONG ont plébiscité l'interdiction » ; mais la Commission s’assoit tranquillement sur la consultation qu’elle avait elle-même organisée, au motif que l’option plébiscitée par les citoyens serait «
non proportionnée ». La Commission choisit aussi de ne pas mentionner l’expertise indépendante conduite à sa demande par BIOIS, qui recommandait, en 2012, l’interdiction du mercure dentaire en Europe à l’horizon 2018. Au contraire, la Commission opte pour des options sans aucun intérêt sanitaire pour le patient : «
l’utilisation d’amalgames dentaires sous une forme encapsulée et l’installation de séparateurs d’amalgames » – des mesures d’autant moins contraignantes que «
la plupart [des chirurgiens-dentistes] les ont déjà mises en œuvre. » La Commission se félicite de ce que, grâce à ces choix indigents, «
des emplois devraient être créés dans le secteur de la fabrication, de l'installation et de l'entretien des séparateurs d'amalgames et dans les entreprises spécialisées dans le traitement des déchets contenant du mercure. »
Troisième principe : continuer de minorer le risque sanitaire lié aux amalgames dentaires.
L’objet affiché de ce règlement n’est pourtant pas de créer de l’emploi, mais «
à long-terme de parvenir à un environnement non toxique », avec «
l’élimination [...] à l’échelle planétaire des rejets anthropiques de mercure dans l’air, l’eau et le sol. » Mais dans le cas particulier des amalgames dentaires, la Commission estime que, bizarrement, «
les risques sanitaires liés à ces derniers ne sont pas clairement démontrés », bien qu’ils constituent sans conteste le premier facteur d’exposition des Européens au mercure.
Il revient maintenant aux États et aux Eurodéputés d’amender ce projet de Réglementation ; espérons qu’ils s’y emploieront pour leur part avec le souci de l’opinion et de la santé des citoyens européens.